Le Pape Urbain VIII

Le Pape Urbain VIII

Le Pape Urbain VIII de la famille Barberini

Maffeo Barberini (1568-1644), devenu Pape Urbano VIII, gouverna de 1623 à 1644 (Pontificat le plus long du XVII°.)

Que retient-on de ce Pape durant ses 21 ans de règne ? On se souviendra du XIII° Jubilé, de la pratique du népotisme ou de la condamnation de Galileo Galilei mais aussi de son rôle dans la diffusion du baroque, que nous verrons plus loin. Ce mouvement artistique et fantaisiste a dépassé les frontières pour se développer dans toute l’Europe.

De façon humoristique, commençons à parler des 3 abeilles volantes, symbole important de la famille Barberini.. Elles sont partout !

La famille à l’origine s’appelait “Tafani”, originaire de Barberino Val D’Elsa ; à Florence leur résidence était le palais Tafani de Barberino. Mais les Tafani (les « taons ») ont préféré changer leur nom d’origine et devenir les Barberini et mettre sur leur blason 3 abeilles volantes en or sur fond bleu à la place des taons, peu représentatifs pour une famille noble. De plus, l’abeille représente plusieurs symboles : la productivité, le travail bien fait, le sacré et le divin. Il y en aurait, paraît-il, plus de 10.000 dans Rome !

Maffeo Barberini fit des études humanistes et de droit et sa carrière fut rapide dans l’église : en deux ans évêque puis cardinal et élut Pape en 1623.

  • Son ascension sociale et ecclésiastique

Déjà à l’époque du Pape Clément VIII, grâce à ses missions, il eut d’excellents rapports avec la cour de France, le monde politique et culturel français.
En 1601, à l’âge de 33 ans, il est nommé nonce extraordinaire pour offrir à Paris la bénédiction et les cadeaux du Pape, à l’occasion de la naissance du dauphin, futur roi Louis XIII. Il vécut 3 ans à Paris en ayant d’excellents rapports avec le roi Henri IV qui, lors de son départ, lui offrit de somptueux cadeaux.
En 1606, c’est même le roi Henri IV qui déposa sur sa tête la coiffe rouge de cardinal devant la cour royale à Fontainebleau.
Après son élection, l’une de ses premières tâches fut la préparation de l’Année sainte de 1625 qui amena à Rome plus de six cent mille pélerins, désireux d’obtenir les indulgences offertes pour la première fois.

  • L’époque de son pontificat : une époque difficile en Europe, dévastée par la guerre de trente ans

Il appuya le pouvoir temporel de la papauté et s’engagea à restaurer le catholicisme avec une grande habileté politique mais aussi avec la force des armes. Il faut dire que ses 21 ans de règne furent confrontés avec la guerre de trente ans (1618-1648) qui opposa catholiques et protestants et les différents pays entre eux. D’un côté, les Habsbourg d’Espagne et d’Autriche détenaient la couronne de l’Empire germanique, et furent soutenus par l’Église catholique, de l’autre s’opposaient les États allemands protestants, alliés des puissances européennes à majorité protestante.
Certes il s’agissait au début de questions religieuses mais par la suite bel et bien de conflits politiques et Urbano VIII fut un partenaire à part entière dans le grand jeu des politiques internationales, tout en étant soucieux du prestige de l’église et de renforcer l’État pontifical…en élargissant les limites !
Mais les enjeux politiques entre les pays n’étaient guère faciles.

  • Sa personnalité et son népotisme

Certainement on lui reconnut de grandes qualités toutefois avec un caractère parfois difficile. C’était un homme de belle présence, passionné d’équitation, expert dans le monde des arts et des lettres. Excellent élève des Jésuites, il aimait composer des poésies en italien mais surtout en latin et en grec.

La seule préoccupation de Urbano VIII fut de créer pour sa famille puissante un état de privilèges en distribuant des titres, des charges, des assignations honorifiques : il cultiva au plus haut point le népotisme, comme firent ses prédécesseurs de la Renaissance.
Il voulut la réalisation d’une demeure digne de sa cour pour l’élever d’égal à égal avec les autres grandes familles romaines : Palazzo Barberini et ses jardins, résidence personnelle mais aussi de représentation où il aimait rencontrer écrivains et personnages de culture. Il appréciait se retirer en leur compagnie dans la villa sur le lac de Albano qui deviendra le Palais pontifical de Castel Gandolfo.

Les dernières années de son pontificat furent marquées par une croissante crise financière. La famille Barberini, après la mort du Pape, fut contrainte à s’enfuir en France pour se soustraire aux accusations d’accumulation exhorbitante de richesses.

  • Son mécénat fut énorme et Gian Lorenzo Bernini en fut l’élu officiel

Urbano VIII fut surtout apprécié comme mécène de la magnifique saison du Baroque romain avec de nombreuses œuvres qui embellissent encore aujourd’hui la ville de Rome : palais, monuments, statues, et tableaux, tapisseries, mosaïques. On peut affirmer que le baroque naît à Rome avec les Barberini puis s’étendra en Italie et au-delà des frontières.
Il voulut montrer à travers l’art l’importance de sa famille et Gian Lorenzo Bernini devint l’artiste officiel de la cour pour presque tous les projets du Pape.

  • Œuvres réalisées à Rome pendant le pontificat de Urbano VIII

• Il transforme Civitavecchia en port militaire

• En 1617, le Pape commanda à Bernini la statue de San Sebastiano et entre 1618 et 1620 les bustes de ses parents pour la basilique San Andrea della Valle.

• En 1625, commence la construction du magnifique Palais Barberini en pur style baroque pour lequel il engagea des artistes comme Carlo Maderno et Francesco Borromini. A la mort de Maderno, il dirigea l’achèvement des travaux (en 1633) avec Gian Lorenzo Bernini qui reprit la suite. L’innovation de cet édifice est considérée parmi les plus extraordinaires dans l’histoire de l’architecture italienne.
On peut y admirer l’escalier héliocoïdale de Borromini et ses 12 colonnes, l’escalier à puits carré du Bernin ou encore le plafond à fresque de Pietro da Cortona.
Ce dernier conçut également le Palais des Papes à Castel Gandolfo où le Pape Urbain VIII appréciait se retirer.

• Comment ne pas parler de la fontaine du Triton de Bernini (place Barberini) réalisée en travertin avec le motif du dauphin, du coquillage et du triton sans oublier le blason papal des Barberini : la tiare pontificale, les clés et les abeilles !

• Peu de temps après, Bernini réalisa la fontaine des abeilles placée à l’époque à l’angle de la place et de via Sistina et aujourd’hui via Veneto.

• Continuons à parler de fontaines…En 1629, Le Pape chargea Pietro Bernini avec l’aide de son fils Gian Lorenzo de réaliser la fontaine appelée “la barcaccia”, place d’Espagne, avec également tiare et abeilles…

• En 1626, le Pape Urbano VIII inaugure solennellement la basilique Saint-Pierre. Pour façonner le baldaquin de Saint-Pierre et ses quatre colonnes torses en bronze de 30 mètres de haut, le Pape ne craignit pas d’enlever les plaques de bronze qui recouvraient le porche du Panthéon, seul monument de la Rome antique resté à peu près intact.

• Pour renforcer Castel San Angelo avec des canons en bronze. Il récupéra de nouveau le bronze du Panthéon d’où le sarcasme romain “Quod non fecerunt barbari, fecerunt barberini” (“ce que n’ont pas fait les barbares, les Barberini l’ont fait”).

• En 1628, le Pape commanda à Gian Lorenzo Bernini son monument funéraire qui se trouve dans la basilique Saint-Pierre. Les parties sombres indiquent la mort (bronze doré et bois) et celles en marbre indiquent la vie. On y voit en haut le pontife en position de bénédiction sur le trône et sur les côtés, en marbre, se trouvent les deux vertus la Charité et la Justice ayant dans les mains une épée avec…les abeilles.

  • La mort de Galileo Galilée

Galilée fut sans aucun doute le plus célèbre savant de son époque et connut un grand succès dans toutes les villes italiennes et en Europe. Il construisit un télescope pour observer le ciel et fit la démonstration que c’est bien la terre qui tourne autour du soleil et non pas le contraire. Le Pape Urbano VIII était lié d’une sincère amitié à son égard.
Quand Galilée publia « le dialogue sur les deux systèmes du monde » (de Copernic et Aristote) à savoir que le soleil est au centre et non la terre, le Pape est furieux et pense qu’il s’est moqué de lui. Le véritable enjeu est l’idée que la science soit supérieure à la religion. Il est alors condamné par le tribunal de l’inquisition pour soupçon d’hérésie alors qu’il voulait seulement défendre la vérité. A 70 ans, à genoux, la main sur la bible, il devra admettre sa faute en prononçant « l’abiura »(abjuration) et donc dire le faux. Heureusement, il n’ira pas en prison et sera assigné à résidence à Villa Médici.

En conclusion, Le Pape Urbano VIII fut certainement un Pape important mais il faut aussi rappeler la condamnation de Galileo, la vie de luxe, anormale pour un pape, le népotisme exagéré et les malédictions du peuple romain, contraint à subir 63 nouvelles taxes. Du reste, la nouvelle de sa mort provoca des démontrations de joie et de haine : le peuple romain essaya de détruire la statue du Pape, œuvre du Bernin, qui se trouvait dans le Palazzo Capitolino. N’y parvenant pas, il cassa en plusieurs morceaux son portrait en stuc dans la cour du Collegio Romano.

Texte de Marion Simprez